Vous savez que je collectionne des livres en édition limitée depuis peu (2 ans) et j’ai une collection modeste de livres imprimés à l’ancienne (letterpress) venant de différents éditeurs de livres pour bibliophiles (Suntup Press, The Limited Editions Club, Imprimerie Nationale). Comme tous les autres collectionneurs, je garde toujours un oeil sur les livres à venir chez une dizaine d’éditeurs (fine presses) et cette fois, mon coeur a chaviré quand j’ai vu que Lyra’s Books sortait la première version bibliophile de « The Alchemist » de Paulo Coelho. C’est un livre que j’ai beaucoup aimé, jusqu’à écrire un review détaillé mais je n’étais pas très sûre de payer 175 pounds + 55 pounds de livraison soit 277 euros pour la version standard (les versions numbered et lettered sont dans les 800 euros, puis 2700 euros). Mon budget de beaux livres annuel est de 600 euros environ, et ce livre tout court en représente presque la moitié.
Vous pouvez voir ici les différentes versions : les deux premières sont des versions Standard (on a le choix entre deux couleurs), la troisième est la version Numbered, et la dernière est la version Lettered.
Voici quelques illustrations partagées par l’éditeur. Certaines sont en couleurs, d’autres en noir et blanc.
L’éditeur partage aussi le process de création, pour qu’on visualise bien les changements entre l’idée initiale et la création finale :
Entre l’annonce de.la sortie du livre et la mise en vente, il s’est passé presque un mois, pendant lequel mon coeur chavire entre « oui je l’achète » et « non je ne l’achète pas ». Est-ce un achat indispensable ? non. Est-ce un livre que je lirai régulièrement ? oui, car c’est déjà le cas.
Biographies de Paulo Coelho
Je suis en train d’hésiter et changer d’avis tous les matins quand j’aperçois chez ma dentiste francophone à Istanbul une bibliothèque remplie de livres de Paulo Coelho. Même si j’ai aimé L’Alchimiste, je n’ai jamais pensé à lire d’autres livres écrits par lui car ça ne m’intéresse pas. En lisant l’Alchimiste, je vois clairement que ce n’est pas un grand écrivain, son style est simpliste. Mais dans la bibliothèque de ma dentiste, il y a un titre qui attire mon attention « Conversations avec Paulo Coelho » (lien Amazon, lien Fnac). Je dois attendre JB chez la dentiste de toute façon, j’ai 1h30 devant moi, j’ai lu tout le livre, et ça m’a beaucoup plu !
Paulo Coelho a une vie beaucoup moins simple que son style d’écriture. Dans ce livre écrit par Juan Arias Martínez, un écrivain espagnol, Juan Arias Martínez résume de longues conversations qu’il a eu avec Paulo dans sa maison à Rio de Janeiro, en face de la plage de Copacabana. Paulo Coelho y révèle pas mal de secrets notamment son (ancienne) association avec une secte (pire que satanique), son enlèvement par un groupe paramilitaire et les tortures endurées, ainsi que ses trois séjours dans un hôpital psychiatrique, placés par ses parents…. Cependant, le contenu vient de la bouche de Paulo Coelho donc même si il révèle des choses embarrassantes, le récit lui appartient quand même totalement.
Maintenant que je me suis lancée dans la découverte de l’auteur, autant creuser davantage. J’ai donc lu la biographie officielle de Paulo Coelho, écrite par le meilleur biographe brésilien Fernando Morais : Le magicien de lumière: L’extraordinaire histoire de l’écrivain Paulo Coelho (lien Amazon, lien Fnac).
Pendant 4 ans, Morais ne lâchait pas Coelho d’une semelle et a interviewé une centaine de personnes ayant connu Coelho. En lisant le testament de ce dernier, Morais a remarqué la mention d’une malle à détruire après la mort de Coelho. Il lui a posé la question et celui-ci lui a lancé un challenge : si Morais retrouve l’homme qui a torturé Paulo Coelho, il aura accès à la malle. Morais réussit, envoie une preuve à Coelho et découvre que dans la malle, ce sont 40 ans de journaux intimes et d’enregistrements audio de Paulo Coelho. Morais jette les 200 pages qu’il a déjà écrites, paie un spécialiste pour organiser toutes les informations de manière claire, et écrit la biographie.
Dans ce livre, on y découvre des réalités encore plus choquantes sur Paulo Coelho. Ce n’est plus une « victime », un « repenti », c’est un homme profondément égoïste, certes victime de la vie à un moment, mais très égoïste à la base. Il ne reculera devant rien pour viser le succès et l’argent. Il fait du « hit & run », profite des gens, et de leur vanité, n’hésitera jamais à mettre ses intérêts au-dessus de tout le monde. Il faisait partie d’une société secrète et glissait des paroles sataniques dans les chansons de Raul Seixas et faisait faire des rites sectaires dans son cours de théâtre. Maintenant il fait partie d’une autre société secrète (RAM) qui a des rites d’initiation bizarres mais gentils: Son maître s’appelle Jean et lui fait faire des voyages par ci par là… L’Alchimiste fait sens, puisqu’il met en avant le concept de la légende personnelle, et comment on y arrive. « Quand on veut une chose, tout l’Univers conspire à nous permettre de réaliser notre rêve », tel est son discours, car une personne profondément égoïste pense effectivement que l’univers n’a que lui et fait tout pour l’aider. En réalité, ce sont des poètes qui ont d’abord financé sa « vanity press », et puis ce sont NOUS, les lecteurs, qui sommes en train de l’aider à réaliser sa légende personnelle càd avoir beaucoup d’argent et de pouvoir.
Après la sortie de ce livre qui a fait un effet « boom » au Brésil (pays où les critiques littéraires détestent Coelho), Morais n’entend plus parler de Coelho. Celui-ci ne répond plus à ses sollicitations. Morais doit se rendre en France où vit Coelho la moitié de l’année pour lui demander pourquoi il n’a pas de réponse. Coelho ne répond pas clairement mais plus tard, donnera une interview à un journal espagnol en disant qu’il avait peur de son propre passé mais il valait mieux que tout ça sorte maintenant. Parmi ces secrets bien gardés, il y a un vieux livre sur les vampires dont l’écriture a été filée à un certain Toninho Buda. Coelho n’a écrit aucun mot mais se voyait attribuer le rôle d’auteur principal du livre. Toninho pensait que son nom figurerait quand même dans le livre mais a été seulement payé l’équivalent d’un repas et 0 mention. Plus tard, Coelho, faisant référence à Toninho comme « esclave » dans son journal intime, a fait venir celui-ci en Europe en lui payant un salaire de misère. Grâce à cette biographie, Toninho a vu le karma lui rendre ce dont il a toujours mérité : son livre sur les vampires, et il a en plus sorti un livre sur Raul Seixas.
(J’espère que vous aimez ces passages de gossip car je suis allée fouiller Internet en brésilien et en espagnol pour vous résumer tout ça. De rien).
D’où vient le succès de Coelho ?
Maintenant, ça m’embête vraiment d’acheter un livre de Coelho et contribuer à sa richesse. Mais en réfléchissant, quand Coelho écrasait les autres pour s’élever, ça finissait mal, donc le karma avait pu lui montrer que ce n’était pas la voie et il a été puni. Sa cupidité et sa soif de pouvoir font que malgré le succès, il ne sera jamais un homme heureux comme vous et moi. Son véritable succès (à partir du Pèlerin de Compostelle) était seulement lié à sa persévérance et aux fois où il n’écrasait personne.
Pour son premier livre « Le Pèlerin de Compostelle« , c’est lui qui a assuré la promotion de son livre. Maintenant, les auteurs le font tous mais à cette époque, c’était l’éditeur qui devait le faire et les auteurs avaient la flemme de participer aux interviews. Coelho au contraire, participait activement, il signait beaucoup de livres, allait voir les libraires pour connaître le nombre de ventes. Il a distribué des flyers devant les théâtres, il a payé de sa propre poche un PR dont le job est de faire mentionner son livre dans des émissions radio, télé, obtenir des interviews etc. Celui-ci était payé décemment mais avait surtout une commission en fonction des ventes du livre. Coelho a su faire de la communication littéraire avant l’heure. Là où il était malin, c’était de dire, lors d’une interview, qu’il était magicien et savait appeler la pluie. Il était aussi habillé en templier/magicien. Un autre journal, intrigué, a voulu tester ses pouvoirs et effectivement lors de l’interview, il a pu faire venir le vent. Les ventes ont ensuite explosé. Son livre est devenu bestseller tout seul, car les critiques littéraires n’en parlaient pas du tout, tout le monde pensait que c’était un phénomène one shot.
Leçon 1 : Alors, la leçon que je retiens ici c’est qu’il faut absolument filer des primes selon résultats pour motiver les gens. J’achète du cuir chez deux fournisseurs. Chez l’un, j’achète peu, seulement quand j’ai besoin car ils ne font pas beaucoup de communication donc rien ne me tente. Chez l’autre, j’achète quand je n’ai même pas besoin car ils n’arrêtent pas de communiquer sur les arrivages. Pourquoi l’employée du 2ème fournisseur communique plus souvent que le premier ? C’est parce qu’elle touche un % du CA !!! Donc forcément, elle fournit 10 fois plus d’effort que celui du 1er fournisseur.
Ensuite, le contrat signé avec le premier éditeur du « Pèlerin de Compostelle » était très intéressant car il prenait en compte de l’inflation, de négociations à faire à chaque réédition, ce qui donnait à Coelho beaucoup de flexibilité. J’ignore si on peut le faire de nos jours avec les éditeurs, mais je trouve ça très smart. Il faut toujours penser avec plusieurs coups d’avance. Paulo Coelho était né dans une famille ultra riche et ce que j’ai remarqué chez les ultra riches, c’est qu’ils étaient économes, géraient bien leur argent; alors que les pauvres étaient beaucoup trop généreux et dilapidaient leurs maigres économies à la moindre occasion. Il faut bien évidemment trouver un juste milieu, mais cela explique pourquoi les riches sont de plus en plus riches, et les pauvres… de plus en plus pauvres.
Leçon 2 : Toujours avoir plusieurs coups d’avance
Même maintenant, Coelho suit de très près les ventes de ses livres, challenge ses collaborateurs, demande aux éditeurs de changer le prix des livres, change d’éditeurs s’ils ne distribuent pas bien ses livres. Comme je dis souvent aux apprentis entrepreneurs, être entrepreneur est le métier le plus difficile de l’entreprise car on doit savoir un petit peu tous les métiers, pas suffisamment pour être spécialiste, mais suffisamment pour ne serait que créer une stratégie gagnante et recruter les bonnes personnes. Quand mes amis entrepreneurs viennent me voir et me disent « Anh, peux-tu t’occuper du marketing pour mon entreprise? Je ne m’y connais rien », je leur dis que c’est très grave, un entrepreneur doit savoir apprendre tout seul. Quand Elon Musk arrive quelque part, il passe plusieurs heures avec chaque spécialiste, il leur pose des questions pointues pour apprendre leur métier en mode express.
Leçon 3 : Être entrepreneur, c’est connaître tous les métiers de l’entreprise
Quand son premier éditeur a refusé de publier « L’alchimiste », Coelho a pu chercher un autre éditeur très facilement et filer aussi « Le Pèlerin de Compostelle » au second éditeur. Comme les critiques littéraires ont raté la sortie du bestseller « Le Pèlerin de Compostelle », cette fois la sortie de l’Alchimiste juste avant les fêtes de Noël a fait un effet « boom ». C’était LE cadeau de Noël cette année-là, et pour plein d’années à suivre.
C’est le Yi King qui a conseillé Paulo Coelho. Le Yi King est un livre millénaire chinois qui est capable de donner des réponses. C’est aussi un livre philosophique qui apprend à toute personne à naviguer dans la vie. C’est mon livre préféré au monde (j’en ai parlé ici) et quand j’ai appris que Paulo Coelho le connaissait et posait des questions au Yi King, son succès ne me paraissait plus mystérieux. Quiconque comprend vraiment le Yi King (lien Amazon) va réussir dans la vie, saura s’adapter aux changements de la société, comme Coelho avec des livres piratés ou l’arrivée d’Internet. S’il y a un seul livre à lire, c’est bien celui-ci.
Un des messages principaux du Yi King c’est qu’il y a un moment idéal pour tout. Si on rate ce moment idéal, il va falloir attendre le suivant. Choisir le bon moment est crucial. Beaucoup de gens autour de moi se voient envoyer des opportunités de dingue par l’univers mais quand l’opportunité arrive, « ah non je ne peux pas, ah non je ne suis pas prêt, ah non ah non ». Ils ne savent pas que malheureusement les opportunités comme ça n’arrivent pas tous les 4 matins, et des fois il faut attendre 12 ans avant qu’une opportunité similaire n’arrive. Donc si on ne sait pas quand l’opportunité arrive, il faut être tout le temps prêt : les connaissances, la santé, le mindset, l’argent… READY.
En connaissant les disciplines anciens comme l’astrologie sidérale ou le Yi King, on a heureusement une petite aide car ces disciplines peuvent donner une idée assez précise du « moment idéal ». Dans mon cas par ex, j’ai pu calculer toute seule que l’année 2022 était mon moment. Ainsi j’ai dit « oui » à tout, et finalement un gros contrat m’est tombé dessus car j’ai dit « oui » à un micro contrat que d’habitude je ne prenais jamais. Dans le cas de Coelho, il a su qu’il fallait absolument publier le livre AVANT Noël, c’était short. Mais publier un tel livre en Janvier n’aurait probablement pas le même impact. Cette idée de « saisir l’opportunité » et « être là au bon moment » ont été bien expliqués dans l’Alchimiste, je trouve. Mais je veux vraiment le mettre en avant dans cet article et ici aussi.
Si vous avez des questions sur ce point précis, n’hésitez pas à laisser un commentaire. Cependant, je ne peux calculer le « moment idéal » que pour JB et moi. Je n’ai pas reçu le *don* permettant de voir pour les autres.
Leçon 4 : Lire le Yi King. Si vous ne le comprenez pas, soyez toujours prêt au cas où une opportunité arrive.
L’agent littéraire de Paulo Coelho à l’international est Monica Antunes. Quand Coelho voulait la virer car elle ne signait rien en 4 ans, celle-ci n’a pas voulu dire « j’abandonne ». Elle a refusé de se faire virer et au foire des livres suivant (où les éditeurs achetaient des droits des livres), elle a remporté ses 16 premiers contrats. Désormais, elle est richissime car elle n’a pas accepté d’abandonner.
Paulo Coelho a toujours voulu traduire ses livres et les distribuer à l’international. Quand je discute avec mes amis entrepreneurs, leur priorité aussi est toujours de trouver une idée « scalable »; par exemple pour un restaurant, ce serait de créer une franchise; pour un produit, ce serait de passer par le MLM; pour un site, ce serait la traduction en xx langues… l’idée est de toucher et être là pour des milliards de personnes, et pas seulement les gens de son village.
Bref, après avoir lu cette biographie (lien Amazon, lien Fnac), je me suis dit que celle-ci était encore plus intéressante que l’Alchimiste ahahah car on voit un cas concret de réalisation de sa Légende Personnelle. Il y a des chiffres de vente, les % de commission, les stratégies de distribution de livres, comment faire face aux piratages, les négociations business. C’est too much pour un lecteur lambda, mais quand on est curieux, ou entrepreneur, ou futur écrivain, ce niveau de détails est excellent !!! S’y mélangent le contexte politique du Brésil, la police secrète, des phénomènes paranormaux, les sectes, les sociétés secrètes, les rites d’initiation… on dirait un roman de Dan Brown en mieux car c’est réel !!
A la fin, j’ai tranché, je décide de me procurer de la version Standard de l’Alchimiste. Je l’ai lu au bon moment càd au moment où j’en avais le plus besoin et ça m’a beaucoup aidée donc je vais acheter cette version bibliophile. Il y a deux couleurs à choisir, j’opte pour la version Gold. Le livre sera imprimé à l’ancienne (letterpress) sur du papier 170gsm Fedrigoni Arena Rough, avec 24 pages illustrées. Le livre est relié à la main et signé par l’illustrateur Gary Gianni. L’étui et les papiers marbrés sont faits à la main. Le dos sera en buckram, du coton épaissi. Le livre est limité à 500 exemplaires. Les 75 exemplaires restants seront mis en vente dans quelques jours sur le site de l’éditeur. Tout le monde recevra sa copie en été 2025. Plus d’infos
Après, ma collection sera presque complète (c’est ce que disent les collectionneurs), il me manque UN livre très précis que je suis en train de chercher sur les sites d’enchères.