[story time] Mon Stage d’Un An à Oslo (Norvège)

Aujourd’hui, nous allons faire un voyage dans le passé, en 2008. Je vais vous raconter mon année de césure / stage d’un an dans une superbe entreprise à Oslo, en Norvège.

Pourquoi une année de césure en Norvège ?

Pour ceux qui ont fait une grande école, la notion d’année de césure devait vous être familière. Entre la 2ème et 3ème année d’école, tout étudiant peut choisir entre : enchaîner tout de suite la 3ème année, ou effectuer une année de césure, pour faire ce qu’il veut : voyager, faire un stage, ou créer son entreprise.

De plus, afin d’obtenir le diplôme, on devait tous avoir

(1) le TOEIC supérieur à 750
(2) avoir passé au moins 4 mois à l’étranger (stage, exchange semester).

Comme je n’avais pas assez de sous pour financer ma 3ème année, survivre pendant quelques mois de recherche du premier CDI et payer les frais liés à l’exchange semester… la meilleure option que j’avais a été de demander une année de césure pour effectuer un stage d’un an à l’étranger.

Et pourquoi la Norvège ? A cette époque, j’étais nulle en anglais et j’avais peur qu’on se moque de moi dans un pays anglophone. J’ai donc limité mes recherches aux pays scandinaves car je savais qu’ils parlaient tous très bien anglais dans ces pays, et je voulais aussi voir comment ces pays faisaient pour être aussi riches et développés.

Comment j’ai obtenu un stage en Norvège ?

A cette époque, je faisais partie d’une association internationale, qui avait une branche dans mon école : AIESEC, dont l’activité principale est de trouver des stages en France pour les étudiants étrangers, et envoyer les étudiants français effectuer des stages à l’étranger.

Excusez-moi pour le résumé très terre-à-terre, mais l’association est plus « meaningful » que ça, il y a une vraie philosophie et envie de changer le monde, et rendre ses actions plus impactantes, mais cela passe d’abord par s’ouvrir soi-même au monde extérieur, à travers les stages à l’étranger par exemple.

Je faisais partie d’autres associations mais AIESEC était mon asso préférée, j’y ai rencontré des gens tellement gentils, ouverts d’esprit. Je consultais régulièrement les stages dispos sur la plateforme d’AIESEC et j’ai vu un stage… trop beau pour être vrai, à Oslo en Norvège, pour un an. Ils cherchaient un stagiaire natif en anglais, mais parlant couramment français. La rémunération était très élevée.

A cette époque, je vous disais que je n’étais pas très forte en anglais (en passant les test blanc de TOEIC, j’avais un score pathétique de 700/990, très insuffisant). Et ayant peu confiance en moi, j’ai zappé cette annonce en me disant que je n’avais aucune chance. Par hasard, A., faisant partie de la même association l’a remarqué aussi et étant au courant de mon envie d’effectuer un stage en Scandinavie, il me l’a montré. Je lui ai dit que je n’avais aucune chance. Mais il a insisté, en disant qu’il ne comprenait pas pourquoi je ne voulais pas postuler pour le job de mes rêves.

Même si je n’avais absolument aucun espoir d’être prise, ses paroles m’ont fait réfléchir. Je me suis dit qu’il fallait absolument que je tente le tout pour le tout. J’ai consacré plusieurs jours à la rédaction de mon CV et de la lettre de motivation en anglais. J’ai harcelé mes professeurs d’anglais pour la relecture. Ils ont passé plusieurs heures avec moi à corriger les fautes d’orthographe et à me conseiller sur la manière de mieux me « vendre » auprès de l’employeur.

Et surprise, on m’a répondu quelques jours plus tard, me proposant un entretien en anglais via Skype. Folle de joie mais morte d’inquiétude, j’ai alors listé toutes les questions possibles, j’ai écrit toutes les réponses en anglais jusqu’à ce qu’elles soient parfaites, je me suis entraînée devant le miroir. Et pendant l’entretien, j’avais mes réponses imprimées devant moi, et quand j’étais trop stressée, je les lisais mais de manière la plus naturelle possible pour que l’employeur ne se doute pas que je suis en train de lire. J’avais très peur aussi de ne pas comprendre leurs questions, mais j’ai tellement bossé l’anglais de manière intensive que même par Skype, j’ai réussi à tout comprendre.

Après ce premier entretien, j’ai dû attendre une semaine. La réponse est tombée : deuxième entretien téléphonique. Même technique, je me suis entraînée à mort.
Une semaine plus tard, un autre mail est arrivé : une dissertation en anglais à rédiger, en format HTML. Là aussi, mes professeurs m’ont aidée à corriger les fautes d’orthographe. Ils étaient eux aussi autant stressés du résultat que moi et s’étonnaient de la lourdeur du process de recrutement, pour un stage de seulement un an. J’étais presque au bout de ma vie, ayant bossé jour et nuit sur ce dossier, sans avoir de plan B.

Jusqu’à ce qu’un mail tombe : j’ai été prise pour le stage.

Je suis allée voir le directeur des études pour lui annoncer la nouvelle. Il était beaucoup moins emballé que moi : le salaire était élevé, mais c’est la Norvège, et en plus c’est le salaire brut. Il était très inquiet aussi du fait que je ne puisse plus revenir en France (je n’avais qu’une carte de séjour à cette époque et une absence > 6 mois  de France m’exposait à un non-retour). Et puis, l’assistante de l’école a trouvé un texte de loi m’affirmant que j’avais droit à un visa de retour.

Rien qu’avec le coaching des professeurs, ma répétition des Questions/réponses devant le miroir… en un mois, je suis passée d’un score de TOEIC merdique de 700 à 810 (premier test en conditions réelles), puis 955 sur 990 pour le test final. Donc avant de partir en Norvège, j’ai rempli une des conditions d’obtention du diplôme : avoir au moins 750 au TOEIC. Une pierre deux coups !

Les autres membres de l’association m’ont beaucoup aidée ensuite pour finaliser le dossier. Et je reste très reconnaissante de l’aide que j’ai reçue de la part de mes professeurs et les membres de l’association. Grâce à eux, j’ai pu obtenir ce stage qui m’a changé la vie.

Mon installation en Norvège

C’est donc aux anges que je suis arrivée début juin en Norvège, et expérimentée l’un des deux nuits blanches de l’année (où on voit le soleil pendant 24h). Comme le stage se faisait dans le cadre de l’association, les membres de cette même association en Norvège sont venus me chercher à l’aéroport, et m’ont trouvé un logement gratuit pendant la première semaine. On m’a ensuite fait visiter une maison adorable, où je pouvais louer une chambre de 20m² pour 4000nok/mois (soit 600€ à l’époque). Ma coloc, qui était la fille de la proprio, a partagé cette grande maison avec moi et son chien.

Ma coloc, adorable, m’a fait faire une clé de la maison aux couleurs du drapeau norvégien. J’ai tellement aimé cette clé que je la garde encore 😀
Même si la chambre se trouvait un peu loin de mon entreprise et coûtait plus chère, je m’entendais tellement bien avec ma coloc, et j’aimais tellement ma chambre à la déco de toile de jouy que je n’ai jamais cherché à déménager.

A l’intérieur de ma chambre, j’avais une cheminée. Dans la cuisine aussi. Il y avait également un système de chauffage électrique, mais quand il faisait trop froid, j’aimais bien allumer la cheminée. C’est un luxe que n’avaient pas les appartements modernes de mes collègues. Le bois de chauffage se vendait dans tous les supermarchés, même les petits, et un monsieur passait dans le quartier, tel le marchand de glace (ding ding ding), aux alentours de Noël, pour nous vendre du bois, pas cher du tout.

Comme vous pouvez voir sur la photo, j’avais un lit King size. Mais c’était en fait deux lits simples mis côte à côte dont les pieds étaient liés grâce à une corde. Dessus, il y avait deux matelas simples et une sorte de matelas/couverture double. Ainsi, si jamais j’avais le malheur de dormir au milieu du lit, j’avais mal au dos le lendemain. Le lit double norvégien est toujours comme ça : deux lits simples mis côte à côte. Ils vont même plus loin : chacun sa couette. Ainsi, personne ne pique la couette de l’autre (c’est important quand on vit dans un pays aussi froid).

En parlant de maison/d’appartement tout ça, un collègue m’a raconté comment ça se passait quand on voulait vendre un appartement en Norvège. Habituellement, tout le monde passe par les agences. Mais passer par une agence, c’est avoir une équipe façon « Stéphane Plaza ». Ils viennent cacher les bibelots moches, sortent de leur sac un petit déjeuner et de la vaisselle trop jolie, un tapis « peau de mouton » (c’est toujours très tendance en Norvège) et prennent des photos grand angle à faire baver tout acheteur potentiel. Et tout ça est inclus dans la marge de l’agence une fois la maison vendue. Jetez un œil sur les annonces immobilières norvégiennes, vous verrez, tout est bien décoré, les annonces sont top, les photos sont magnifiques.

Démarches administratives

Grâce à ma carte de séjour française, j’ai reçu très rapidement une carte de résidence norvégienne, suivie d’un numéro de sécurité sociale de 11 chiffres (dont les 6 chiffres correspondent à ma date de naissance, et 5 autres chiffres au hasard). Ce numéro est d’une importance sans égale, car sans celui-ci, je ne pouvais rien faire en Norvège : ouvrir un compte bancaire, aller voir un médecin, avoir un abonnement téléphonique etc.

Ma coloc m’a dit que c’était grâce à ce numéro qu’elle avait appris sa date de naissance 😀 Mais qu’il lui est déjà arrivé, quand on lui demandait sa date de naissance, de donner les 11 chiffres d’un coup.

Ce n’était pas facile d’avoir un compte bancaire en Norvège. Normalement, il fallait résider depuis au moins 2 ans en Norvège, ou avoir beaucoup d’argent, ou avoir un très bon job. J’ai mis 2 semaines à avoir le numéro à 11 chiffres, mais quelques mois à ouvrir un compte. Pendant ce temps-là, je n’étais pas payée. Je ne sais plus comment je faisais, je crois que la comptable de l’entreprise a eu la gentillesse de faire un virement tous les mois pour ma coloc, mais je devais m’auto-transférer de l’argent depuis la France via Western Union. Je ne pouvais pas non plus prendre un abonnement téléphonique, du coup j’ai acheté une carte prépayée chez Lebara, qui avait en plus des tarifs avantageux pour appeler JB en France.

L’entreprise

Je pense que travailler pour cette entreprise, c’était une des périodes les plus heureuses de ma vie. Après un long process de recrutement, j’ai donc rejoint cette entreprise internationale, qui a gagné, 3 ans plus tôt, le titre de « 2ème meilleur employeur de Norvège ». Etant peu expérimentée, je n’ai pas réalisé à cette époque à quel point l’environnement de travail était exceptionnel, j’en étais très contente, mais je ne mesurais pas à 100% ma chance.

C’était une entreprise fondée par deux ingénieurs tellement exceptionnels qu’ils ont sû s’entourer des gens exceptionnels. Chacun des employés était admirable, super fort dans son domaine, reconnu par l’industrie, en plus d’être humainement ouvert, abbordable. Je respectais et admirais chacun d’entre eux. Si mon process de recrutement (de stage) me semblait très long, le process de recrutement pour un CDI pouvait durer plusieurs mois. Entre les nombreux entretiens avec chacune des personnes de l’équipe, un déplacement jusqu’à Oslo, l’entretien avec les RH… ce n’est pas étonnant d’avoir ce niveau d’intelligence concentrée sur les 4 étages de l’entreprise.

Je n’étais pas geek mais comme mes parents sont développeurs, j’ai toujours aimé poser des questions techniques aux ingénieurs et développeurs. A aucun moment, ils ne m’ont regardée de haut, ils se sont mis à mon niveau pour expliquer leur travail en détails et étaient tout le temps disponibles et souriants. J’ai également beaucoup apprécié le soutien discret de mes collègues (d’autres services). Quant ils ont appris mon départ de l’entreprise (parce que je voulais aller en Australie continuer mes études), ils ont cru que je n’étais pas gardée par le management alors ils sont allés voir mon manager pour lui dire du bien de moi <3

Bon, revenons à l’entreprise. Les bureaux n’étaient pas équipés comme ceux de Google (avec le toboggan, les salles pour dormir etc.) mais ils ont fait le maximum pour nous rendre heureux au travail. D’ailleurs, une personne était recrutée à plein temps pour s’occuper de notre bien-être. Nous avions accès à la cantine, qui servait le petit-déjeuner, déjeuner et goûter. On devait payer une somme symbolique de 30€/mois pour tout ça. Et j’en ai, bien évidemment, beaucoup profité 😀 Le chef, qui était vietnamien, cuisinait divinement bien et savait alterner entre la cuisine norvégienne, italienne, japonaise et vietnamienne. C’était très rare de manger la même chose deux jours de suite.

Dans les bureaux, on pouvait s’installer comme on voulait. Un professionnel est passé dans les bureaux pour régler la hauteur des tables à notre hauteur, il a commandé des chaises spéciales pour ceux qui avaient mal au dos, plusieurs de mes collègues s’asseyaient sur les ballons type Pilates pour travailler.

Tous les vendredis, il y avait un ostéo qui passait, pour 30€ il nous remettait les os en place (le reste étant payé par l’entreprise), nous avions une salle pour faire dodo si jamais on était fatigué, des jeux dispos à la cantine (babyfoot, playstation…) et de nombreuses sorties à la campagne pour souder l’équipe. Lors de ces fêtes ou week-ends, d’autres équipes internationales ont été invitées aussi, ainsi, nous avons pu rencontrer nos collègues américains, japonais, anglais…

On nous donnait gratuitement des cours de norvégien, 2 fois par semaine. Mais à chaque fois, c’étaient les mêmes gens qui recommençaient les cours de débutants. L’entreprise étant internationale, et les norvégiens faisaient énormément d’effort pour parler, même entre eux, en anglais pour que les collègues internationaux comprennent… j’avoue que j’étais plus concentrée à apprendre l’anglais que le norvégien. Le danois, le suédois et le norvégien sont assez similaires, même si tout norvégien vous dira que le danois parle avec une patate dans sa bouche, tandis qu’il trouvera l’accent suédois « mignon ». Etant moins riche que la Norvège, la Suède voit beaucoup de ses habitants immigrer en Norvège.

Pour l’anglais, c’est vrai que les norvégiens parlent bien anglais. Les films et séries anglophones ne sont jamais doublés à la télé ni au cinéma, mais sous-titrés. L’anglais est enseigné plus tôt à l’école aussi. Le norvégien a aussi quelques similitudes avec l’anglais, d’où un apprentissage plus facile (par rapport au français).

Je faisais partie d’une équipe de 8 stagiaires venant de 8 pays différents, dont l’Australie et le Canada, autant vous dire que j’ai énormément progressé en anglais. Nous étions encadrés par un manager souvent absent. Mais on s’entraidait beaucoup et les objectifs ont été atteints. Vers la fin de mon stage, j’ai ensuite été encadrée par deux autres managers, qui étaient plus présents. L’un d’eux était d’origine japonaise et c’est lui qui m’a appris à être perfectionniste dans le travail.

Je n’ai jamais voulu m’installer en Norvège en fait. Cela n’a jamais fait partie de mon projet, malgré l’environnement exceptionnel et des collègues adorables, j’ai toujours su que la neige et le froid ne pourraient jamais être mes amis.

Le climat

Je suis venue en Norvège en Juin et j’ai passé un été formidable avec mes collègues. Dès qu’il y avait du soleil, tout le monde se donnait rendez-vous au parc et faisait du barbecue (on pouvait acheter des plaques de barbecue prêtes à l’emploi, très pratique). Les norvégiens se baignaient dans les lacs à 20°C (trop froid pour moi), 30°C à l’ombre pour eux c’était déjà la canicule.

Mais en octobre, les premiers flocons de neige sont tombés. Tout le monde m’a dit que c’était exceptionnel qu’il neige aussi tôt, mais depuis cette année, tous les ans, la neige arrivait de plus en plus tôt.

Ce qui est magique, c’est la gestion de la neige en Norvège. Dès les premiers flocons, et même dans les petites rues comme la mienne, le lendemain, il y avait un monsieur venu de nulle part, en train de mettre du sel. Les bus et métros fonctionnaient comme d’habitude. Genre… rien ne s’est passé.

Donc sur les 12 mois en Norvège, j’ai dû supporter la neige pendant 6 mois. Dont une semaine à -20°C, où je devais aller au bureau comme d’habitude.

La légende dit que durant la 1ère année en Norvège, les étrangers vont tous se casser une jambe ou un bras en glissant sur le verglas. Mais j’étais trop pauvre pour me permettre d’aller chez le médecin (même si c’était en grande partie couvert par la sécurité sociale), alors je faisais tout pour ne rien casser du tout. Et j’ai tenu bon ! Je ne suis MÊME PAS tombée sur les fesses ! Ah !!

Il y avait des moments très durs, où je ne voyais pas le soleil en partant de chez moi, ni en rentrant de chez moi. Le soleil est apparu faiblement pendant mes heures de travail, avant de disparaître aussitôt. Une fois, j’ai pété un câble. Il neigeait beaucoup beaucoup et je devais rejoindre des amis. J’étais perdue, il neigeait, j’avais froid, il faisait déjà noir, j’étais désespérée. Il n’y avait pas la 4G à l’époque, j’ai donc appelé pour annuler le dîner alors que l’hôte insistait pour venir me chercher dans la rue. Et je suis rentrée à la maison en pleurant. Je n’en pouvais plus !

Tout au long de mon séjour en Norvège, j’ai eu le temps d’écrire à chacun de mes amis en leur disant de me rappeler à la fin de mon stage (en Juin, quand il fait beau et chaud), de me souvenir de l’hiver. Car je savais que si je devais prendre une décision en Juin, j’allais rester en Norvège 😀

Aussi, pour ne pas tomber en dépression, j’ai fait comme tous les autres norvégiens : acheter une lumière très forte pour imiter le soleil (luminothérapie) et prendre des comprimés d’omega 3. C’est aussi pour cette raison que beaucoup de norvégiens vont à la gym, 3 fois par semaine. Bon, l’autre choix consiste aussi à boire beaucoup d’alcool, et les soirées ne manquent pas. Mais l’alcoolisme et le suicide restent un sujet tabou et j’ai appris seulement des années plus tard que deux de mes collègues en étaient victimes.

Puisqu’ils vont à la gym et qu’ils sont naturellement dotés d’un physique de mannequin, ils et elles, sont très très beaux (belles). Curieusement, étant entourée de canons sur pattes, je n’ai pas développé de sentiment d’infériorité. Au contraire, si mon miroir n’était pas là, j’aurais pu croire que j’étais aussi grande, élancée et blonde. ça m’a beaucoup amusée de m’en rendre compte, mais je pense que si tant de beauté n’a pas détruit ma confiance en moi, c’est parce que PERSONNE, absolument personne, ne s’est permis de me faire une seule remarque sur mon physique. Ils n’ont jamais vu ma petite taille comme quelque chose d’anormal, mes cheveux noirs et mes yeux bruns comme ceux d’une alien, ils ne m’ont jamais regardée en me scannant de haut en bas. Alors que dans d’autres pays, beaucoup de gens se sont permis de se moquer de moi pour ma petite taille (je suis asiatique pour ceux qui ne le savent pas), et curieusement, plus ils sont petits, plus ils ont tendance à se moquer.

Salaire & Coût de la vie

Comme je vous le disais en haut, mon salaire était très élevé par rapport à la France pour une stagiaire, mais le salaire donné dans l’annonce était le salaire brut. On m’a ensuite enlevé 25% du montant, correspondant au paiement des impôts prélevés à la source. Après le paiement du loyer, et une grande partie mise dans un compte d’épargne pour financer mon avenir (mes études en Australie, mes frais de scolarité…), il me restait 500€/mois pour tout.

Vous allez me dire, ohlala t’es riche. Mais avec 500€/mois en Norvège, mon pouvoir d’achat correspondait à 150€ en France. Le pauvre Kinder Bueno là, il coûtait déjà 4€. Du coup, j’ai dû trouver une alternative. C’est alors que je suis partie à la recherche d’un supermarché vietnamien.

Donc dans ce supermarché, on pouvait trouver des morceaux de viande pas très nobles (entendez par là plus d’os que de viande), qui sont beaucoup moins chers que dans les supermarchés norvégiens. Comme je faisais essentiellement des soupes, ça ne me gênait pas plus que ça. Je faisais beaucoup de riz (consistant et pas cher). Au supermarché norvégien, j’achetais surtout du saumon congelé (pas cher du tout car la Norvège pêche et exporte des millions de saumons tous les ans). Quant aux légumes, eh ben, comme ils étaient hors de prix, je comptais plutôt sur la cantine de l’entreprise pour manger mes 5 fruits et légumes par jour. Mais je pouvais m’estimer plus chanceuse que JB qui, à ce moment là, en France, ne mangeait que des sachets de nouilles instantanées à 0,7€ l’unité.

Voilà, 500€/mois rien que pour me nourrir le soir, les week-ends, payer les transports et le téléphone.

Les autres stagiaires avaient une autre méthode : ils faisaient du co-voiturage pour faire du shopping une fois toutes les 2 semaines en Suède. Même si l’essence était très chère (alors que la Norvège en exportait), c’était plus économique de faire Oslo – Suède que de faire des courses en Norvège 😀 Bon, dedans, il y avait beaucoup d’alcool et beaucoup de viandes.

Donc avec mon salaire, j’ai pu mettre des sous de côté pour mon exchange semester en Australie et j’en étais tellement heureuse. Je n’ai encore jamais gagné autant de ma vie. Malheureusement, à cause de la crise financière et le prix du pétrole qui diminuait de jour en jour, la couronne norvégienne a perdu 10% en un an. Cela impactait également mes collègues dans d’autres bureaux car leur salaire (même s’ils sont américains) était calculé selon la couronne norvégienne. Depuis, la couronne norvégienne n’a jamais retrouvé son cours d’avant et par rapport à 2009, elle a perdu 20% de sa valeur vs. l’euro.

Malgré mon jeune âge, j’ai toujours su gérer mon argent. j’ai regardé régulièrement les cours NOK-EUR pour être au minimum au courant du moment idéal pour faire le transfert, regarder les conditions générales pour transférer un maximum d’argent vers la France en payant un minimum de frais, j’étais très stricte sur le montant à économiser etc. Ma mère m’a toujours sensibilisée à la gestion d’argent (sans en faire une conversation quotidienne à table non plus hein). Ayant grandi dans un pays avec une inflation à 2 chiffres, elle m’a toujours dit qu’il fallait avoir différentes devises, suivre les cours, elle m’a appris comment économiser (je vous en ai parlé ici). Merci maman !

J’ai demandé aux norvégiens comment ils pouvaient supporter un taux d’impôts aussi élevé (mes collègues en CDI payaient jusqu’à 50% d’impôts sur le salaire brut + une fortune pour leur voiture, leur permis, leur maison etc.) et ils étaient tous positifs par rapport à ça. Ils m’ont parlé de la scolarité gratuite (même à l’université), de leur couverture médicale, de leur 1 AN de congé de maternité (payé à 80%), les papas ont un très long congé de paternité aussi, avec la possibilité de rester un an de plus sans perdre son travail (les norvégiens en profitent en général pour faire 2 enfants d’un coup). L’idée, c’était : on donne beaucoup, mais on reçoit aussi beaucoup.

Ce qui est impressionnant, c’est que toutes les déclarations d’impôts de chacun étaient consultables en ligne l’année suivante. On pouvait donc, en quelques clics, savoir combien gagnait notre CEO ou combien gagnait notre voisin de bureau. Cette transparence est vraiment exceptionnelle, et je pense que ça doit beaucoup aider pour l’égalité homme-femme.

D’ailleurs cette égalité homme-femme se voit partout dans la vie quotidienne, du congé de paternité très très long jusqu’au paiement du restaurant (moitié-moitié) même pour un rendez-vous galant, en passant par la drague.

Les soirées, alcoolisées, ou pas

L’alcool coûtait cher donc la règle commune à chaque soirée norvégienne, c’était : chacun apporte sa boisson. Et avec l’argent récupéré des bouteilles laissées par les convives (il y a des machines pour recycler les bouteilles et on touche 1nok à 1,5nok/bouteille), l’hôte pouvait financer une partie de sa soirée suivante. Comme il n’y avait rien à faire à Oslo, il y avait beaucoup de soirées. Je devais passer 2 à 3 fois/semaine chez mes collègues, ça m’a permis de visiter beaucoup d’appartements du coup 😀 et m’apercevoir que les appartements étaient aussi bien décorés que chez IKEA et surtout très spacieux.

Une soirée mémorable qu’on a faite ensemble, c’était pour regarder un film Bollywood. Il n’y avait que 4 personnages principaux, mais il y avait tellement de retournements de situation que l’hôte (un collègue indien) devait mettre le film sur pause plusieurs fois pour nous expliquer le scénario 😀 genre « c’est qui lui déjà ? »

C’est en cherchant l’adresse du supermarché vietnamien que je suis tombée sur un forum des vietnamiens à Oslo et j’ai lié d’amitié avec eux. Ils étaient tous en doctorat, et contrairement à ce que vous pouviez penser, les communautés vietnamiennes à l’étranger ne servaient en général pas à l’entraide (financière, conseils ou autres), mais à… manger ensemble 😀 Toutes les semaines, il y avait un dîner vietnamien cuisiné et organisé par une dizaine de personnes, et on s’asseyait tous sur le parquet. C’était vraiment fun, ils étaient adorables et très cultivés.

JB à Oslo

JB est aussi venu à Oslo me rendre visite. Il a visité les locaux de l’entreprise, participé aux soirées fortement alcoolisées norvégiennes, et on avait l’habitude de prendre le bus gratuit d’IKEA, juste pour y manger une glace à 10nok (la meilleure et la moins chère d’Oslo). 2h aller-retour 😀

Conclusion

Je peux vous raconter encore plus de choses sur la Norvège, mais ce texte est déjà très long.

Le secret de la richesse de la Norvège n’était malheureusement pas lié à leur capacité à entreprendre ou quoi que ce soit, mais la découverte du pétrole.
Les norvégiens ont vu leur pays devenir soudainement riche, mais eux sont restés humbles et gentils comme avant, en menant une vie très simple (d’ailleurs, la recette norvégienne la plus célèbre consistait juste à cuisiner pendant des heures quelques morceaux d’agneau avec du sel, du poivre et du chou). La Norvège de 2009 (je ne sais pas si ça a changé depuis) était pour moi la preuve que le paradis pouvait exister sur terre, que les humains pouvaient vivre en harmonie ensemble. Être gentil (sans que ce soit une convention sociale comme au Japon), être VRAIMENT gentil, honnête, respecter l’autre, s’entraider, donner le meilleur de soi-même que ce soit au travail, à la maison ou avec ses copains. Un petit monde parfait (si l’on oublie la présence de la neige 6 mois par an).

Je pense que j’y suis allée pendant l’apogée de la Norvège et l’apogée de mon entreprise, les deux rencontreront plus tard quelques problèmes économiques, et j’ai suivi tout ça avec beaucoup de tristesse, mais c’est la vie.

Cette expérience a changé ma vie car elle m’a permis d’avoir un super niveau en anglais. Elle m’a ouvert toutes les portes, j’ai pu postuler ou rejoindre très facilement des compagnies internationales plus tard. Je suis très reconnaissante pour l’aide que j’ai reçue pour postuler à ce poste, reconnaissante de l’accueil de mes collègues chez cette formidable entreprise norvégienne et reconnaissante des nombreuses heures de discussion avec ma colocataire.

Malheureusement, la France a changé son système de carte de séjour pour les étudiants et après ce stage, je n’ai pas pu revenir en France pour finir mes études. C’est alors que j’ai décidé d’aller en Australie pour un exchange semester et recevoir une grosse claque dans la figure (suite au prochain épisode).

Je suis revenue en Norvège une fois pour le moment, mais en croisière avec JB.

Merci de m’avoir lue jusqu’à la fin, vous avez été très courageux(se) 😀

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    Anh

    Anh est franco-vietnamienne et a vécu dans de nombreux pays (Russie, Australie, France, Norvège, Vietnam). Elle aime par dessus tout les chats, le DIY et la bonne cuisine. Ayant une très bonne mémoire, Anh est capable de vous donner le tarif du petit bus pris entre le Chili et la Bolivie qu'elle a pris il y a 3 ans.

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    Un commentaire
    • Répondre Nadia

      4 octobre 2018, 7 h 35 min

      Je voulais également faire un stage en Norvège, mais malheureusement, ma demande a été refusée plusieurs fois. J’ai dû trouver autre chose à faire pendant l’été, j’avoue que j’étais trop triste…

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