Après plusieurs mois à lire des livres un peu trop politiques et trop business, j’ai eu envie de retrouver un peu de légèreté, un peu de voyage à travers des romans ou autobiographies. Voici ma liste de livres sur le Japon que j’ai beaucoup aimés. Certains ont été lus il y a quelques années et je relis quelques passages de temps en temps.
Mémoires d’une geisha
J’ignore de quand date ma passion pour les geishas, j’ai lu pas mal de livres sur les geishas, les femmes les plus glamour et les plus artistiques du Japon. Ce ne sont pas des courtisanes, mais des artistes : elles excellent en chant, danse, instruments de musique mais aussi dans l’art de la conversation.
J’ai trouvé deux livres qui me plaisent vraiment beaucoup, dont celui-ci, par Arthur Golden. Il a interviewé de nombreuses geishas et anciennes geishas et son livre est devenu un best-seller, adapté au cinéma. Malheureusement et le livre, et le film ont fait parler d’eux, mais pas pour de bonnes raisons.
A la sortie du livre, Iwasaki, une ancienne geisha qu’il a interviewée, l’accuse de mensonges sur certains détails : la prostitution des geishas via le mizuâge & les services sexuels à rendre aux Dana (une sorte de sponsors).
Quant au film, le public chinois est furieux de voir trois actrices chinoises célèbres interpréter le rôle des trois geishas. Alors qu’on le sait si bien, les japonais ont commis des crimes atroces en Chine et la haine contre le Japon n’est pas encore effacée du jour au lendemain.
Malgré les incohérences et erreurs historiques comme géographiques à la fois dans le livre et dans le film, les deux œuvres nous transportent littéralement vers le Japon d’avant-guerre. On change d’époque, de pays, de langue… et est plongé immédiatement dans cet univers glamour mais amer des geishas.
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Geisha : a Life
Suite au succès du roman d’Arthur Golden, Iwasaki, ancienne geisha très connue, est en colère contre les vérités tordues par l’auteur. Elle décide elle aussi de sortir sa propre autobiographie pour rétablir la vérité et son livre devient un best-seller également. Elle y raconte avec une poésie et une nostalgie touchantes : son enfance, son paradis perdu, comment elle est devenue la geisha la plus célèbre de Gion. Il y a quelques détails sympas sur le Japon, comme le fait qu’elle se rase le visage depuis qu’elle a un an, et ce, tous les mois.. Elle parle aussi de l’apprentissage des geikos (geishas à Kyoto), du festival Miyako Odori chaque printemps à Kyoto (c’est grâce à son livre que je l’ai découvert et j’y ai assisté avec JB).
Elle est geisha à la base donc sa plume n’est pas aussi bien qu’un écrivain, mais le contenu est très intéressant. Elle a tenté, en vain, de moderniser l’univers des geishas mais s’est heurtée au poids des traditions.
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L’appel à l’étude
L’Appel à l’étude, publié entre 1872 et 1876, est l’ouvrage le plus important de l’ère Meiji (1868-1912). Son auteur, Fukuzawa Yukichi (1835-1901), s’y livre à un double exercice : penser la manière dont le Japon peut et doit « accéder à la civilisation » et convaincre ses compatriotes de le suivre dans cette voie, la seule à même selon lui d’éviter à son pays la colonisation par les puissances étrangères.
Best-seller absolu de l’époque, ce livre, qui a joué un rôle capital dans la construction du Japon contemporain, offre de nombreuses clefs pour comprendre ce que fut vraiment la restauration de Meiji pour les Japonais.
Pendant l’ère Edo, le Japon s’est complètement renfermé. Cependant, quand ils ont constaté la présence des Occidents partout en Asie, et se trouvant devant la menace d’être réduit aussi en colonie, le Japon a compris qu’ils devaient se moderniser, c’est une question de survie. Des missions ont été envoyées faire le tour du monde pendant 2 ans pour observer le monde occident, apprendre de leurs succès comme de leurs erreurs. Fukuzawa Yukichi faisait partie de ses missions. Il a ramené énormément de livres étrangers, mais il a surtout écrit beaucoup de livres – dont un qui a un énorme impact sur le Japon, et même jusqu’à maintenant : l’Appel à l’étude. Son livre fait toujours partie des best-sellers au Japon, plus d’un siècle plus tard.
Ce livre, pourtant essentiel pour comprendre l’acharnement des Japonais et leur détermination pour la perfection et leur devoir envers leur patrie, n’a été traduit en français qu’en 2018. Cependant, non seulement la traduction est soignée mais la préface et le post-face sont très complets et permettent de comprendre le contexte ainsi que le contenu général de l’œuvre.
Si la première partie est la plus célèbre (il s’agit en fait d’un discours prononcé lors de l’ouverture d’une école), les autres parties la complètent et apportent des précisions et critiques. L’ensemble de l’œuvre a été écrit et publié sur plusieurs années.
Le contenu est étonnamment moderne. Et après la lecture, on a non seulement envie d’apprendre, continuer à apprendre, mais aussi à servir le pays comme il se doit. Je pense que la première partie peut être déjà donnée à lire aux adolescents. Car c’est facile à comprendre (le discours a été écrit pour être compris par tous), il y a des phrases encore vraies à nos jours, comme :
Le Ciel, dit-on, ne crée aucun homme supérieur aux autres hommes ni aucun homme inférieur aux autres hommes. (…) La différence entre les sages et les sots vient donc simplement du fait que les uns ont étudié et les autres non. (…)
La frontière entre la liberté et l’égoïsme est franchie dès que l’on cause du tort à autrui.
Le responsable de la tyrannie n’est pas le gouvernement, mais le peuple lui-même qui cause son propre malheur. Puisqu’un peuple stupide appelle un pouvoir tyrannique, il est logique que de bons citoyens soient dirigés par un gouvernement éclairé. Et c’est parce que, actuellement, dans notre pays, nous avons un tel peuple, que nous avons aussi un tel gouvernement. Que le peuple devienne moins vertueux, qu’il sombre dans l’ignorance ou l’illettrisme, et les lois du pays deviendront plus répressives.
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Les livres d’Amélie Nothomb
J’ai tellement lu des choses négatives sur Amélie Nothomb, et voir sa photo en couverture de son roman annuel n’aide pas : en quoi c’est si important d’avoir sa tête sur tous les romans ? Mais il ne jamais juger le livre par sa couverture (never judge a book by its cover), l’habit ne fait pas le moine donc j’ai commencé par lire son meilleur livre sur le Japon Ni d’ève ni d’Adam et j’ai été agréablement surprise.
Ce n’est pas facile de trouver des occidents, maîtrisant parfaitement le japonais, ayant vécu avec des japonais, raconter avec autant d’humour et de détails les différences culturelles, les difficultés de la langue etc. et Amélie Nothomb, en quelques phrases réussissent à nous amener avec elle dans ses périples au Japon des années 90, avec brio.
Ses livres sont toujours trop courts et se lisent en quelques heures. J’ai surligné plein de choses car on apprend des choses qui n’existent nulle part ailleurs : pourquoi elle pensait que son fiancé faisait partie du yakuza (mafia japonaise) alors qu’il n’avait pas de tatouage ? comment se passent l’ascension et la descente du mont Fuji ? pourquoi il faut payer un conversationniste lors des dîners ? etc. il y a des passages où l’on est absolument mort de rire.
Ensuite, son roman Stupeur de tremblements traite d’un sujet plus grave : le racisme et le sexisme dans les entreprises japonaises. Comment la culture japonaise enlève le peu d’individualisme de chaque employé pour viser une efficacité globale. Son expérience dans une firme japonaise est tellement incroyable que beaucoup de monde l’a accusée d’avoir menti, d’exagéré, d’être plus romancière qu’autobiographe… Mais au milieu de cet enfer sur terre, elle trouve encore de l’autodérision, de l’humour… si bien que malgré le sujet grave du livre, on rigole énormément aussi.
Ce sont les deux romans que je vous recommande les yeux fermés.
Le troisième : La Nostalgie Heureuse est comme un Behind the Scenes d’un reportage qu’elle a fait avec TV5, pour revenir au Japon après 16 ans. Celui-ci m’a fait verser beaucoup trop de larmes. Je ne le conseille pas pour sa valeur littéraire, mais pour votre curiosité. Il faut savoir que les livres d’Amélie Nothomb sont traduits en japonais, donc son retour permet de voir les personnes dont elle parle dans ses livres, mais aussi de voir comment ils réagissent pendant les retrouvailles, alors qu’ils ont aussi lu des choses écrites sur eux. Dans ce livre, il y a un passage où sa traductrice confirme qu’Amélie n’a aucunement exagéré ce qui se passait au sein des firmes japonaises, où son ancien fiancé japonais revenait sur le tremblement de terre et la catastrophe à Fukushima. A part ça, on apprend moins sur le Japon que sur Amélie elle-même.
Je vous conseille de lire ce livre tout en regardant le reportage – pour avoir plus d’informations.
Dans ce reportage, elle explique aussi pourquoi sa tête est partout : après le succès de son premier roman Hygiène d’un Assassin, les gens ne pouvaient pas croire qu’une jeune femme de 23 ans pouvait écrire un tel livre, et que c’était forcément un homme derrière – d’où son besoin de mettre sa photo en couverture. La pauvre Amélie a également raconté le viol collectif qu’elle a subi à 12 ans, elle a confié sans honte d’entendre en elle une voix méchante en permanence en elle depuis cet événement, et comment elle la fait taire grâce à l’écriture. C’est un personnage haut en couleurs, mais aussi très touchant, et j’ai vraiment du mal à comprendre les critiques envers elle. Les gens la jugent principalement pour son vocabulaire varié (attribué au snobisme), mais surtout son nom de famille – il faut croire que dans le monde francophone, on ne peut pas être riche et talentueux. C’est trop pour une seule personne.
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J’espère sincèrement que cette liste vous a donné des idées de lecture. N’hésitez pas à lire nos articles (carnets de voyage & guides) sur le Japon.