Visite de l’Amazonie Colombienne Carnet 3/4 : Plantes Médicinales avec un Chamane, Pêche aux Piranhas et observation des Caimans (Crocodiles)

Je suis toute excitée aujourd’hui car nous allons passer toute la matinée en compagnie d’un chamane / guérisseur et partir pêcher les piranhas l’après-midi. Si vous avez raté les 2 épisodes précédents, c’est ici et ici

Note : les carnets de voyage contiennent beaucoup de « spoilers » et de photos. Si vous y allez bientôt et vous vous intéressez seulement aux infos pratiques, sachez que nous avons publié ce guide pratique de l’Amazonie sur le blog (vous y trouverez les coordonnées de notre agence, des conseils et le budget détaillé).

Partie 1 : Carnet de voyage
Partie 2 : Conseils pratiques

Partie 1 : Carnet de voyage

JOUR 3 : Visite d’un autre village Ticuna

Nous reprenons le bateau aujourd’hui, pour nous rendre dans un autre village des Ticunas, à 30mn en bateau. Avec cette chaleur écrasante, ça fait du bien d’être sur le bateau, le nôtre a un plus une bâche nous protégeant du soleil. Le luxe ultime !

J’apprécie de plus en plus notre guide Nader, il est ultra respectueux, des animaux, des plantes, des humains… à chaque fois qu’on croise un autre bateau, ou une famille faisant sa lessive au bord du fleuve, il ralentit pour ne pas les gêner en créant de vague. Les autres n’ont pas forcément le même tact.

Rencontre avec Carlos

Ce matin, la visite ne se fait pas avec Nader mais Carlos, le guérisseur / chamane très connu dans le coin. C’est la visite la plus intéressante de tout notre séjour en Amazonie donc je ne vais pas être avare en explications.

D’habitude, il passe de village au village soigner les gens, mais il est là avec nous aujourd’hui. A 5 minutes près, on aurait eu un autre guide, mais la chance nous sourit pendant tout notre séjour en Amazonie, nous avons toujours les meilleurs guides pour nous.

Carlos est guérisseur, nous les appelons chamanes (un terme d’origine sibérienne) mais en espagnol, ça se dit plutôt curandero.

Un curandero est un guérisseur en Amérique hispanique. Ils administrent des remèdes pour les maladies. Leurs pouvoirs sont considérés comme surnaturels dans la mesure où la croyance populaire dit qu’ils traitent directement avec des esprits malveillants à l’origine des maladies. Source : wikipedia

Note : les chamanes amazoniens ne sont pas des sages ou des êtres éveillés au sens occidental du terme. La définition de guerrier-sorcier lui convient mieux. N’allez pas voir les chamanes amazoniens pour du développement personnel.

C’est une affaire de famille, Carlos a appris à soigner grâce à son père qui a appris de son grand-père. Mais il affirme que si quelqu’un s’y intéresse vraiment, il peut aussi lui enseigner son savoir. Les étudiants viennent aussi apprendre chez Carlos, mais il leur manque encore beaucoup de pratique pour pouvoir utiliser les mêmes recettes que lui dans les hôpitaux.

Nous n’avons pas réussi à lui tirer les vers du nez sur la 1ère origine des connaissances des plantes médicinales, mais j’ai pu apprendre, dans une interview donnée par un anthropologue (vous pouvez lire son livre ici, lien Amazon), que les peuples indigènes en Amazonie *péruvienne* étaient enseignés directement par les plantes, ils connaissent leur nom et savent utiliser la plupart des plantes présentes (alors qu’il y en a des milliers). Ils communiquent avec la nature à l’aide des plantes hallucinogènes – et l’esprit de chaque plante se présente elle-même, et enseigne aux humains leurs propriétés médicinales et comment préparer les potions. Ce même anthropologue cite comme exemple la boisson hallucinogène à base d’ayahuasca : il faut utiliser deux plantes pour l’obtenir. L’Ayahuasca permet de produire de la diméthyltryptamine (DMT), responsable des hallucinations mais sa prise par ingestion est inefficace car une enzyme de l’estomac, la monoamine oxydase, la transforme en métabolites inactives. Il faut une autre plante pour désactiver cette enzyme. Alors comment expliquer que les indigènes ont pu, comme par hasard, trouver parmi les 80 000 plantes différentes en Amazonie, deux plantes, qui vont bien ensemble, pour préparer leur boisson ? Il y a plus de chance de gagner au loto que de trouver la combi parfaite.

Carlos aussi communique avec l’esprit de la nature, à l’aide de la plante de tabac et coca.

feuilles de coca

Il nous dit que les animaux savent aussi qu’il est guérisseur et il va nous le démontrer. Il s’approche d’un nid d’abeilles et prend le nid dans ses mains, les abeilles sortent du nid mais aucune abeille ne l’attaque. Note : ne pas tenter l’expérience chez vous.

Quand il cueille les feuilles pour préparer les médicaments, il demande d’abord à la Mère Nature d’envoyer de l’énergie aux plantes. Ensuite, il donne les potions aux patients, en chantant… il nous a fait la démo, le chant est tellement beau que j’ai eu les larmes aux yeux.

Carlos a 16 parcelles immenses : il y a des plantes médicinales mais aussi des arbres fruitiers, du manioc pour la consommation de sa famille. En 3h30 nous n’avons pu visiter qu’une infime partie.

Il y a une feuille, de même famille que la menthe, qui sent exactement, mais exactement comme mon parfum préféré Un jardin après la mousson d’Hermès. En Amazonie (et même en Colombie tout court), tout a l’air d’avoir plus de saveur et d’odeur, même la feuille de citron sent 100 fois meilleure que ce qu’on a en Asie. D’ailleurs, en faisant les courses à Medellín, on a passé de longues minutes à renifler les feuilles de basilic du supermarché tellement ça sentait bon.

Il y a une autre fleur permettant de calmer les rages de dents. En mâchant cette fleur, la langue est comme anesthésiée, puis une sensation de fraîcheur et de goût de menthe envahit toute la bouche, c’est très étrange mais aussi très amusant.

Cet arbre est important, son écorce permet de soigner les morsures d’un insecte particulièrement féroce, qui pond les œufs sur votre corps – et vous pouvez en mourir. Carlos voulait même nous montrer l’insecte en question mais heureusement, il n’était pas « à la maison ».

Sur l’arbre en question, vous pouvez voir les feuilles d’une autre plante qui se collent au tronc, ces feuilles permettent de bien s’endormir… mais sont utilisés aussi pour endormir d’autres personnes pour leur voler les vêtements… ou leurs femmes. Cette plante est très connue et fait partie de plusieurs contes populaires.

Celui-ci est pour garder un homme fidèle. Il suffit de laver ses vêtements avec, les feuilles sont super collantes et y restent pendant des jours. Je me suis dépêchée d’en coller une sur JB, on ne sait jamais… 😀

Celle-ci est à retenir absolument, je vous ai pris en photo la feuille pour que vous puissiez la reconnaître. En cas de morsure de serpents, il faut utiliser la tige de cette plante, et en faire une boisson.

La légende dit que si on frappe 2 fois cet arbre (qui a en plus des propriétés anti-rides), et le tronc se fissure, on a droit à une autre femme. Carlos a réussi 2 fois, il a 3 femmes maintenant (sur les 5 autorisées). Il cherche actuellement une 4ème femme, blanche cette fois, qui est partante ?

Chez les Ticunas, les femmes ont l’air d’avoir beaucoup de pouvoir. Elles peuvent décider d’avoir des enfants, ou non. Elles peuvent aussi avoir des amants, tout comme son mari peut avoir des maîtresses… Après les premiers mois suivant l’accouchement, elles sont entièrement prises en charge par leur mari (ou leurs filles) qui font tout pour elles. Carlos travaille seul sur ses terres, en disant que sa femme (ses femmes) sont là pour être aimées, choyées et pas pour travailler.

Beaucoup de plantes que nous montre Carlos aident à améliorer la performance sexuelle. Disons que les locaux sont déjà en excellente santé grâce à la boisson chuchuwasa, qui donne de la vitalité, et protège contre plein de maladies (il soigne même le paludisme). Cette boisson se vend aussi à Puerto Narino, je vous recommande d’essayer, c’est super bon !

Il y a même un arbre pour soigner le cancer (certains touristes viennent jusqu’en Amazonie pour ça).

Alors ils viennent voir Carlos surtout pour des problèmes de cœur (amour), pour tomber enceinte, ne pas tomber enceinte, pour l’accouchement… et surtout pour l’équivalent du Viagra, car quand on a jusqu’à 5 femmes, il faut assurer derrière…

Il y a une plante où l’on peut souffler le nom de celui/celle qu’on convoite. Je ne sais pas si c’est efficace, mais comme Carlos a oublié le nom de Nadia, notre traductrice, il ne risque pas de l’épouser d’aussitôt ahahah

Il se met soudainement à pleuvoir (des cordes) et heureusement nous avons notre imperméable spécial Amazonie prêté par l’agence. Carlos, lui, se content d’une feuille de bananier, c’est vraiment trop chou.

Notre promenade se transforme en food tour car on a bien faim. On ne s’en lasse pas de ces fruits de palmiers, ou des bananes, ou le lulo de son jardin qui ont tellement plus de saveur qu’au supermarché. Comme quoi la forêt peut être dangereuse mais aussi nourricière.

Soudainement, on entend un bruit, comme celui d’une goutte d’eau qui tombe. Ce bruit se répète encore et encore et on se rend compte qu’il s’agit d’un oiseau (mochilloso ? par sûre de l’orthographe). Vient ensuite un bruit qui nous fait froid dans le dos : on dirait des rires d’enfants. Mais il n’y a pas d’enfants ici, c’est juste un autre oiseau.

Je tombe dans un trou, assez gros. Heureusement le propriétaire de ce trou (on ne sait pas quel animal dangereux) est absent. Plus de peur que de mal.

Je fais une petite parenthèse pour vous dire à quel point on apprécie Nadia, notre traductrice. Elle pose plein de questions pertinentes et nous traduit aussi les réponses. Et quand Carlos est évasif, elle ne lâche pas l’affaire, et insiste pour qu’il réponde aux questions posées. Donc je pense que le guide est important mais avoir un bon traducteur, ça aide aussi énormément. De plus, Carlos est très touché par l’intérêt que nous lui portons et par les questions pertinents de notre traductrice. Au lieu de passer 3h comme prévues, on a passé 3h30 et s’il ne pleuvait pas, on était partis pour toute la journée je pense ahahah Nadia me dit également que même si les indigènes parlent très bien espagnol, des fois, les mots qu’ils utilisent sont peu précis donc il ne faut pas hésiter à demander plus d’infos complémentaires. Par exemple, ils peuvent parler de tigro (tigre) mais il s’agit d’un petit chat sauvage tout mimi, et pas un vrai tigre.

Nous quittons Carlos à regrets et reprenons le bateau pour déjeuner à Puerto Narino. Nous avons encore 1h de repos avant de partir pour toute l’après-midi.

Après-midi : visite du lac Tarapoto

Nous partons un petit peu plus tard dans l’après-midi pour nous rendre au lac Tarapoto. Sur le chemin, nous voyons beaucoup d’oiseaux mais aussi des plantes absolument merveilleuses comme celle-ci, qui est à base une plante parasite.

Sur le lac, nous voyons encore des dauphins gris. Ils mettent bas ici, entraînent les petits à chasser, avant de les amener vers le fleuve d’Amazone. Nous sommes censés pouvoir nous baigner ici mais il fait un peu frais.

On va un peu plus loin et on trouve un coin tranquille mais tellement beau que si le paradis existe, il doit fortement ressembler à ça.

Nous pouvons également observer plein d’oiseaux, des petits comme des grands, c’est magnifique ! L’eau est trouble, mais il y a un petit oiseau capable de voir jusqu’à 1m de profondeur et pêche sans aucun problème.

une sorte d’aigle

Nous pêchons avec des cannes toutes simples et JB a pu pêcher trois petits poissons (qu’il relâche aussitôt car trop petits). Les poissons aiment manger les fruits donc il faut imiter le bruit de fruits qui tombent dans l’eau. Le guide a pu pêcher deux piranhas, suffisamment gros pour finir dans notre assiette le soir.

Je suis complètement horripilée par ce poisson avec deux petites antennes. Quand JB l’a pêché pour la 1ère fois, on l’a filé très rapidement au guide qui nous explique qu’il peut piquer donc il faut lui bloquer la tête pour enlever l’hameçon. Quand JB en a pêché en deuxième, j’ai pu l’observer plus attentivement, et le petit bruit que j’associais aux oiseaux – vient en fait de ce poisson. C’est un poisson qui parle OMG, il fait « arrrggghhh » avec sa petite voix criarde. On l’a relâché très rapidement.

Dès que la nuit tombe, les moustiques viennent nous dévorer mais la nature est bien faite, en quelques minutes, les libellules sont venues manger les moustiques et nous protéger !

La chasse aux caïmans – crocodiles

Dès que tout devient noir, le guide nous amène en bateau voir les caimans (les crocodiles). A l’aide d’une lampe torche, il repère les yeux des caimans qui sont oranges.

La lampe dans une main, la pagaie dans l’autre, il dirige le bateau tout en attrapant le caiman à la main (mais quelle main ???). La 1ère tentative est un échec. Mais il ne se décourage pas, on met encore 30 minutes à tracker un autre caïman et cette fois, c’est une réussite. C’est un bébé caïman noir, qui fait à peu près 60cm. Bien sûr, le caiman est relâché très vite.

On est à la recherche d’un caïman blanc cette fois. Il repère un deuxième caïman à l’aide de sa lampe, mais quand nous voyons la taille de ses yeux et la distance entre les yeux, nous comprenons qu’il s’agit d’un caïman de 3 mètres et qu’il ne sera pas possible de le choper comme ça par le cou 😀 Nous avons trop de chance, car c’est le plus gros caïman que notre guide ait vu dans le coin.

Etre dans le noir total, sur un bateau au milieu de l’Amazonie est une expérience extraordinaire, on est beaucoup plus sensibles aux bruits et il y a des lumières venant de milliers d’insectes fluorescents, qui clignotent tels des guirlandes. Que lindo !

Sur le chemin du retour, le bateau s’en va à toute vitesse dans le noir total, parfois troublé par la lampe de poche lorsque notre guide a besoin de se repérer.

JB et moi sommes en train de nous dire que visiter l’Amazonie en bateau nous semble l’option la plus safe et agréable…. quand nous voyons des ombres s’approcher du bateau et heurter JB nous faisant crier de stupeur : il s’agit simplement de sardines qui sautent partout. D’habitude elles sautent une par une mais là, c’était 3 par 3. Le bateau n’est pas si safe que ça finalement ahahahah

Au menu ce soir : les deux petits piranhas pêchés par notre guide.

Juste pour infos, les piranhas ne mangent que des cadavres, ou très rarement, quand vous avez une énorme blessure. Peu de risque de vous faire attaquer, même si vous vous baignez à proximité.

Quand ils mordent, c’est un bout de chair qu’ils arrachent, et pas une blessure ordinaire, car ils ont une mâchoire hyper puissante. Les attaques de piranhas sur les humains « normaux » sont rares, et ne se font que quand les piranhas manquent cruellement de nourriture, ce qui n’est pas le cas ici car ils ont plein d’autres choses à manger. Source

Despite the folklore about these fishes, there are few, if any, reliable records of attacks by piranha schools on large animals, including humans. Additionally, there is a misunderstanding about actual attacks on live humans and scavenging by piranhas on humans already dead due to other causes such as heart failure and drowning. The most common profile of a piranha injury on humans is caused by a single fish biting only once. The typical bite consists of a single, circular, craterlike wound with laceration of tissues. Injuries caused by piranhas on bathing people occur mostly in dammed waters because of the proliferation of the fish there as well as their spawning and parental-care behavior.

Lisez la suite de notre aventure par ici

Partie 2 : Conseils pratiques

Nous sommes partis avec l’agence Amazonas Jungle Tours. Pour plus d’infos sur les tarifs & le programme, consultez notre guide pratique pour l’Amazonie colombienne ici

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Visite de l’Amazonie Colombienne Carnet 4/4 : Dauphins gris, Forêt Primaire Péruvienne San Antonio de Cacao, Mirador et Cabanas del Friar
Visite de l’Amazonie Colombienne Carnet 2/4 : Puerto Nariño, la forêt secondaire, les insectes venimeux et les dauphins roses
    Anh

    Anh est franco-vietnamienne et a vécu dans de nombreux pays (Russie, Australie, France, Norvège, Vietnam). Elle aime par dessus tout les chats, le DIY et la bonne cuisine. Ayant une très bonne mémoire, Anh est capable de vous donner le tarif du petit bus pris entre le Chili et la Bolivie qu'elle a pris il y a 3 ans.

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