Visite de la mine de Potosí (Bolivie) : Une atmosphère digne de Germinal

Potosí est l’une des villes les plus hautes du monde : 4070 mètres d’altitude ! Elle a été fondé en 1545 par les colons espagnols pour exploiter la mine d’argent de la montagne « Cerro Rico » (montagne riche) qui domine la ville. Les mineurs étaient des esclaves indiens et africains. Entre 1545 et 1825 (date de l’indépendance de la Bolivie), on estime que 8 millions de mineurs sont morts dans cette montagne par manque d’oxygène ou à cause des éboulements. 8 millions ! Près de 80 morts par jours pendant 280 ans !

Partie 1 : Carnet de voyage
Partie 2 : Conseils pratiques

Partie 1 : Carnet de voyage

Cette mine a rempli les caisses de la couronne espagnole pendant toute cette période que l’on appelle le « siècle d’or espagnole ». La légende dit d’ailleurs que la quantité d’argent extraite suffirait à construire un pont traversant l’Atlantique jusqu’à l’Espagne.

Depuis la mine est la principale « attraction touristique » de la ville. L’argent est quasiment épuisé mais des milliers de mineurs continuent à exploiter d’autres minéraux tel que le zinc. Les mineurs travaillent pour leur propre compte, ils sont organisés en coopérative.

J’ai un petit peu hésité avant de décider de faire cette visite : zoo humain ? Voyeurisme malsain ? Tourisme de la misère ? Je comprends tout à fait les réserves qu’on peut avoir avant une telle visite. Puis la curiosité a pris le dessus. J’ai par contre pris très peu de photos, si des touristes venaient me prendre en photo sur mon lieu de travail, je les enverrais bouler rapidement.

Tout juste arrivé à notre hôtel, je réserve un tour pour le lendemain pour 100 bolivianos avec un guide anglophone (80 bolivianos pour un guide hispanique). Petite appréhension avant de partir, c’est tout de même autre chose que de visiter le désert d’Uyuni ou de faire du snorkelling aux Philippines.

A 14h, une personne vient me récupérer à l’hôtel, nous prenons un petit bus local pour quelques minutes et nous arrêtons devant « l’agence », une minuscule pièce où je retrouve la guide et les 6 touristes argentins que je vais accompagner. Nous nous équipons : bottes, pantalons, veste, casque et lampe, en 5 minutes nous avons l’allure de parfaits mineurs.

Nous nous rendons ensuite juste à côté dans une boutique qui vend du matériel pour les mineurs. Il n’y a que ça dans toute la rue, il faut dire que les mineurs doivent acheter eux-même leur matériel. La guide nous explique que si nous le souhaitons, nous pouvons acheter des cadeaux pour les mineurs que nous croiserons.

Mais qu’est ce qu’on peut bien offrir à des mineurs ?

  • Des feuilles de coca qu’ils mâchouillent en permanence pour couper la faim
  • Des cigarettes, sans filtre évidemment…
  • De l’alcool à 95° : non pas pour désinfecter la mine mais pour boire, coupé avec un peu d’eau.
  • Des sodas
  • De la dynamite pour creuser la roche

Oui, de la dynamite ! Elle est en vente libre tout à fait légalement à Potosi. Un enfant de 10 ans peut venir en acheter sans que personne ne soit surpris.

Un bâton de dynamite

et sa mèche

Je demande à la guide quel est le « meilleur » cadeau. Elle me conseille d’acheter 6 petites bouteilles de sodas. Ca me revient à peine à 20 bolivianos.

Nos achats effectués, nous prenons de nouveau un petit bus local pour nous rendre à l’entrée de la mine. On entre tout de suite dans le vif du sujet, je dois m’écarter rapidement car deux mineurs sont en train de sortir en poussant un chariot rempli de minéraux. A leur mine déconfite, on comprend tout de suite qu’on est dans la vraie vie, pas dans une mise en scène pour touristes en quête de sensations fortes.

Nous entrons dans le labyrinthe. Avec mon mètre 85, je dois tout de suite me courber. Nous sommes dans « l’allée principale » mais c’est déjà très étroit. La guide nous demande d’être particulièrement vigilant car nous devons rapidement nous plaquer contre le mur si des mineurs arrivent avec des chariots. Pas question de les ralentir dans leur travail.

De longs tuyaux servent à amener de l’oxygène, c’est une « innovation » par rapport à l’époque coloniale où les mineurs mourraient majoritairement par manque d’air. Je n’ai pas de problème particulier pour respirer mais j’ai rapidement un mal de tête, signe que la qualité de l’air ne doit pas être au top.

Un peu plus loin, nous retrouvons 3 mineurs passablement éméchés devant la statue d’El Tio, le dieu du monde souterrain à qui les mineurs font des offrandes afin d’en obtenir la bienveillance. Je n’ai pas pris de photos, je vous laisse chercher sur Google, c’est assez particulier. S’en suit un échange entre les mineurs et les touristes argentins, je regrette de ne rien comprendre car ils ont l’air de bien rigoler.

Nous reprenons notre visite dans ce dédale, notre guide qui est haute comme trois pommes est comme dans un poisson dans l’eau. Je serais absolument incapable de retrouver mon chemin si je me perdais ! Au loin nous entendons des détonations de dynamite. Nous croisons de temps en temps des mineurs à qui nous offrons boissons, feuilles de coca, cigarettes, …

Cela doit faire une heure que nous sommes entrés dans la mine et la fatigue se fait déjà sentir : j’ai mal au dos, mal à la tête. Le chemin que nous prenons doit pourtant sembler une autoroute pour les mineurs qui passent leur journée dans cet enfer. La guide nous montre un minuscule trou avec une échelle qui descend 200 mètres plus bas. Un peu plus loin c’est cette fois-ci une échelle qui monte 150 mètres plus haut. Dans ces zones là, plus question de rails pour pousser les chariots, les minéraux sont extraits à dos d’homme. Plus question de gros tuyau pour acheminer de l’air, il faut veiller à en prendre un avec soi. Je m’inquiète en m’apercevant que les tonnes de pierre au dessus de notre tête sont maintenus par de simples poutres en bois. Les conditions de sécurité sont déplorables.

Au hasard des couloirs, nous entendons des mineurs travailler dans un trou au dessus de nous. La guide les interpelle et ils nous envoient une corde à laquelle auquel nous attachons un sac avec quelques provisions. La guide me demande si je veux monter les rejoindre. Depuis le début de la visite, elle m’a demandé plusieurs fois si je voulais venir travailler ici demain matin, je crois donc à une blague. Lorsqu’elle me repose la question, je comprends que ce n’est pas vraiment le cas. Je me demande bien comment je peux escalader ce mur. C’est à ce moment que les mineurs renvoient la corde et que je comprends… Il n’y a que quelques mètres à gravir mais je dois tout de même m’employer : il n’y a guère de prises au mur, les bottes sont glissantes et la respiration difficile. Evidemment aucun baudrier pour s’assurer, si je lâche la corde je me casse la jambe.

J’arrive finalement dans une minuscule cavité où je me retrouve face à 3 mineurs à qui je serre la main. Un seul des touristes me rejoint, il n’y a de toute façon pas de place pour les autres. Le touriste ouvre son sac et leur « offre » un bâton de dynamite. A ce moment là je me demande vraiment ce que je fais là. J’étais tellement bien deux jours plus tôt dans le paradis du désert d’Uyuni. J’espère qu’il ne va pas avoir la bonne idée d’utiliser la dynamite tout de suite. Je me détends en le voyant poser la bâton à côté. Pour nous remercier, ils nous offrent un verre d’alcool à déguster cul sec évidemment. Heureusement, ce n’était pas l’alcool à 95°, ou alors très dilué. Après quelques minutes, nous redescendons, opération encore plus casse-gueule que la montée.

Après un peu moins de 3h, c’est la fin de la visite et je suis bien content de retrouver l’air libre. Mon mal de tête ne me quittera pas jusqu’au coucher… Comment font ses hommes pour rester là 10h par jour, tous les jours, dans des conditions bien plus éprouvantes que ce que j’ai pu apercevoir ? Un groupe de 2 ou 3 mineurs doit extraire une vingtaine de chariots de minéraux par jour. En fonction de la qualité, un chariot rapporte environ 10 bolivianos (1,4 €…). Ils doivent verser une partie de cette somme à la coopérative, acheter le matériel nécessaire à leur travail et essayer de survivre…

Que retenir de cette visite ? Je ne sais pas trop. Je ne regrette pas de l’avoir faite, on a beau savoir que « ça existe », ce n’est pas pareil que de le voir avec ses propres yeux. Mes quelques « cadeaux » bien dérisoires ont le mérite d’avoir amélioré un tout petit peu leur journée.

J’en retiendrai surtout l’immense gratitude d’avoir eu la chance d’être né en France, d’avoir fait des études, d’avoir un bon travail et de ne jamais avoir à remettre les pieds dans un endroit pareil.

Partie 2 : Conseils pratiques

Budget

  • Visites
    • 100$B/personne la visite des mines (le prix varie fortement d’une agence à l’autre), nous sommes passés par notre hôtel (Hostal San Pedro Velmont) donc moins cher. 80$B si c’est en espagnol
    • 25$B de cadeaux pour les mineurs environ

Conseils pratiques

  • Deux départs par jour : 8h et 14h. Les visites durent 3h-3h30.
  • Si vous venez de Uyuni, vous raterez quand même la visite de 14h, il vaudra rester dormir au moins une nuit à Potosí, visiter les mines le matin, et prendre le bus de l’après-midi pour Sucre ou le bus du soir pour La Paz.
  • Il est d’usage que les touristes achètent des cadeaux pour les mineurs. Si vous achetez des bâtons de dynamite, demandez-leur de ne pas les utiliser devant vous. Ce n’est pas rare qu’en guise de remerciements, ils l’utilisent devant les touristes pour montrer à quoi ça ressemble, et ce n’est pas bon du tout pour vos poumons
  • Venez avec un minimum d’affaires car vous risquez de les salir dans la mine
  • Ceux qui ont des problèmes respiratoires devraient réfléchir deux fois avant de visiter les mines

 

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    Jean-Benoit

    Passionné de SEO, Jean-Benoit a toujours rêvé d'aventures et de grands espaces. Ce tour du monde est pour lui la réalisation de son plus grand rêve.

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